Nouvelles de Champéry
Jeudi, 24 juin 2021
Allocution d’ouverture
André Berdoz, vice-président usam
10h30 C’est sous un ciel chargé et menaçant que se sont ouvertes les 54es Journées romandes des arts et métiers (JRAM). André Berdoz, vice-président de l’usam s’est adressé aux invités dans son allocution d’ouverture. «L’année dernière, nous pensions sortir d’une crise sans précédent. Aujourd’hui, nous y sommes toujours. Osons dire… pas de reconfinement cet automne!» Nous parlerons cette année de numérisation, un thème qui nous intéresse de plus en plus et qui a pris beaucoup d’importance durant cette pandémie. Et nous accueillons chaleureusement la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter, cheffe du DFJP. Voici un bref rappel des mesures de protection.
André Berdoz, vice-président de l'usam, ouvre les 54es Journées romandes des arts et métiers, placées sous le thème de la numérisation.
10h35 – 11h20 Revitalisation de l’économie suisse par la numérisation
Karin Keller-Sutter, conseillère fédérale cheffe du DFJP : Je vous remercie de cet accueil chaleureux. Les JRAM sont un rendez-vous incontournable en Suisse romande. Nous sortons d’une épreuve collective. Les tensions ont parfois été très fortes. De nombreuses entreprises ont dû s’adapter à la numérisation. Le Certificat Covid est un autre enjeu. Sur le sentiment de méfiance, l’identité électronique présente un paradoxe. L’initiative sur les entreprises responsables aurait été acceptée si seuls les moins de cinquante ans avaient voté. Le oui au partenariat avec l’Indonésie a été accepté mais avec un résultat serré. Les 18 à 39 ans ont rejeté le texte.
Sur trois objets soumis au vote en 2020 et 2021, la même méfiance s’exprime, en particulier en Suisse romande, et sur l’Arc lémanique, région pourtant dynamique économiquement. On assiste à l’émergence de nouveaux acteurs qui impactent les campagnes de votation. Nous entrons dans une phase délicate. La crise a montré que les égoïsmes reprennent le dessus. Au plan fiscal et à l’international aussi, l’environnement devient de plus en plus hostile. Il faut rester compétitif et attractif. C’est payant, la Suisse est première au classement de l’IMD.
Un pour tous, tous pour un, c’est ce qui va guider notre action. Notre marge de manœuvre financière pour amortir la crise n’est pas un hasard. Le frein à l’endettement a été accepté par le peuple. Maintenant, l’Etat doit retrouver son rôle d’avant la crise. Nous devons retrouve la confiance. Lutter contre les doutes. Il n’y a pas de recette miracle. Il faut renouer le dialogue. Vous allez jouer un rôle dans le rétablissement de la confiance et vos atouts sont nombreux. Ces dernières années, l’économie a été un bouc émissaire trop facile. Je vous souhaite des échanges nourris et amicaux. Et me réjouis de discuter avec votre président Fabio Regazzi.
10h52 Débat avec Fabio Regazzi, président usam animé par Jérôme Favre.
Sur la manière dont vous avez vécu cette crise?
Karin Keller-Sutter: Regagner la confiance, cela veut dire sortir. On ne peut pas rétablir la confiance à distance. Le Palais fédéral ressemblait à une maison hantée, toute vide. Pour développer des idées, échanger des idées, il faut se voir physiquement. J’ai vécu des périodes plus intéressantes. Je n’avais plus vu deux de mes frères depuis l’année passée.
Fabio Regazzi: Bonjour à tous, je suis impressionné par la maîtrise de la langue française de notre conseillère fédérale. Sur la numérisation, tout le monde parle de numérisation, mais quand on va dans le concret, on bute contre une certaine méfiance, comme vous l’avez dit. Deuxième point, le sentiment de mécontentement de la population. Il faut retrouver cette confiance.
Etes-vous content du travail du Conseil fédéral?
Fabio Regazzi: Nous avons été critiques, dans une démocratie c’est légitime. Je n’envie pas le Conseil fédéral d’avoir dû prendre de telles décisions. En tant qu’association, il est légitime de ne pas être d’accord et de le faire savoir démocratiquement, d’en débattre publiquement, de se confronter.
Qui de ces mesures antilibérales, est-ce difficile pour vous comme PLR?
Karin Keller-Sutter: Oui, ce ne fut pas facile de limiter les libertés. Mais il fallait protéger la population et les entreprises, ce n’a pas toujours été un plaisir. Cela m’a beaucoup préoccupé. Durant une crise, le gouvernement doit être fort. Nous sommes en train d’en sortir. Je comprends ce que dit Fabio Regazzi. J’ai eu de la pitié pour les restaurateurs, les artisans qui ne pouvaient rien y faire. Vos soucis pour payer les factures, payer le personnel.
Sur les relations à l’UE, en enterrant cet accord-cadre, a-t-on créé de nouveaux problèmes?
Fabio Regazzi: Au moins on peut regarder vers l’avenir. Il y aura des difficultés mais je suis confiant. Le point de rupture est passé, ce fut le plus dur. L’Europe aura aussi intérêt à se remettre à la table des négociations. Ce ne sera pas un chemin facile, mais il faudra le faire. On finira par trouver des solutions.
Une volonté d’être raisonnable et de trouver des solutions au Conseil fédéral?
Karin Keller-Sutter: On ne peut pas continuer les négociations quand on est dans une impasse après sept ans. Il y aura une reprise de la discussion. Nos échanges avec les pays voisins fonctionnent de manière concrète, c’est de là qu’il faut repartir. Je suis responsable de libre-circulation, cela marche dans le concret. Le Brexit a aussi beaucoup influencé la Commission – qui était sous le choc. En reprenant une certaine distance, c’est dans l’intérêt de l’UE de retrouver de bonnes relations avec la Suisse.
Fabio Regazzi: C’est vrai que nous avons trainé et que cela a créé de la nervosité au sein de la Commission européenne. Mais tout le monde voit aussi que nous n’aurions pas eu une majorité en cas de votation de l’accord tel qu’il se présentait. Par réalisme politique. Il faut aller de l’avant et trouver un dénominateur commun entre nous.
Quel est l’agenda?
Karin Keller-Sutter: Nous voulons stabiliser la relation. Puis il faudra voir s’il y a des écarts entre la Suisse et l’UE et si cela vaut la peine d’adapter certaines situations. Il faut laisser retomber la poussière, une reprise sera difficile avant les élections de 2023.
Confiance et CO2, méfiance entre villes et campagnes: comment travailler sur ce dossier pour un compromis acceptable?
Fabio Regazzi: Le bateau était surchargé, et je pensais que cela serait difficile devant le peuple. On a perdu beaucoup de temps en préparant cette loi qui a échoué devant le peuple. Nous avons donné hier une conférence de presse sur ce sujet. Il faudra trouver des compromis. Il y a encore un potentiel non exploité – pour des mesures simples – et que les forces les plus extrémistes se mettent à la table des négociations.
Karin Keller-Sutter: Je ne suis pas convaincu par l’existence du fossé ville campagne. Les villes sont aussi plus à gauche que les campagnes. La confiance se retrouve par le débat. Il faut pouvoir s’exprimer librement ce qui n’a pas forcément été le cas.
11h20 – 12h30 La Suisse, véritable cancre numérique?
Jean-Henry Morin, UNIGE: En automne 2010, la conseillère fédérale Doris Leuthard constatait un retard et tirait la sonnette d’alarme. Puis ce fut la première journée numérique à Bienne. Un expert a dit que la Suisse parlait trop et agissait pas assez. Puis plus grand-chose. Pourquoi en est-on là. D’abord la Suisse souffre d’un complexe de supériorité. On est numéro 1 sur tout. La Suisse s’est construite sur une expertise technique. Cela suggère ce réflexe de l’ingénierie. On trouve une piste pour faire.
La mauvaise nouvelle est politique. Pourquoi un politicien prendrait la responsabilité d’un dossier aussi coûteux. Mais les lignes sont en train de bouger. On peut agir sur l’offre. Sur les grandes entreprises. Un débat sur la responsabilité numérique émerge. Pas en faisant des lois pour faire des lois. Il faut imposer une sorte de cadre. Fatalité ou opportunité. Je suis un optimiste. La question n’est pas si, mais quand. Et partir tard n’est pas un problème, on peut profiter de l’expérience des autres.
Une PME n’a pas les moyens de faire de la veille technologique. Il y a donc un travail de conscientisation, qui doit être accompagné par des politiques publiques. La Suisse représente 1/3 du grand Séoul. C’est tout petit. Mais il faut un timonier. Il faut renoncer un peu à cette spécificité cantonale. Le Gothard du numérique, c’est l’expression de Doris Leuthard. Quand j’ai entendu cela, j’ai dit alleluia.
André Berdoz, vice-président de l’usam sur sa participation à EasyGov: Je donne mon avis de patron, avec les électriciens et les fiduciaires. Nous avons été extrêmement concrets dans notre appréciation. Nous avons été présents huit ans sur ce projet. Nous avons mis l’accent sur toutes les relations avec la Confédération. C’est utilisé par 40'000 entreprises actuellement sur 600'000. Le SECO doit faire un effort de communication pour soutenir le projet. Nous sommes en train de faire en sorte que les cantons et les communes soient aussi intégrés. Durant la pandémie, nous avions donc une solution à disposition. Pour les crédits Corona sur cinq ans, 40 milliards ont été mis à disposition en deux semaines. Pour remplir un formulaire, il fallait 10 minutes. .60'000 demandes ont été déposées en cinq jours ! Une leçon à retenir, c’est que les petits patrons n’avaient souvent pas de réserves. Parmi les facteurs de réussite, pas de bureaucratie, confiance et assurance, partenariat public-privé. Donc c’est une success-story et non un cancre numérique.
Catherine Pugin, État de Vaud: Faut-il toujours faire du numérique ou seulement quand c’est utile ? Le numérique, ce n’est pas seulement technologique, c’est aussi une culture. La confiance est centrale. Il y a aussi une prise de conscience politique. Je suis à ce poste de délégué depuis début 2020. Les différents cantons s’organisent, la Confédération aussi, sur ce thème de la transformation numérique, une conférence latine a été créée également pour mutualiser les expériences, éviter de faire les choses tout seul dans son coin. En 2022, une nouvelle plateforme sera lancée, plateforme politique suisse, avec, communes, cantons et Confédération. Dans le Canton de Vaud, la stratégie numérique a été créée en 2018. Point important, la souveraineté et une démarche inclusive. Avec des thématiques fortes, comme la gouvernance avec plus de transversalité en cassant les silos. Sur les infrastructures et la sécurité, les datacenters, les réseaux. Une grande réflexion se met en place sur l’éducation et la sensibilisation, l’accompagnement des entreprises également, la fixation d’une politique sur les données. Nous essayons de mettre en place un numérique responsable en se posant les bonnes questions en amont. Nous essayons de comprendre quels sont les besoins des gens, en particulier les collaborateurs de l’Etat. Il y a encore des gens qui ont des problèmes pour ajouter un fichier à un e-mail. Nous essayons de faire de la veille technologique. Le Canton du Jura a lancé un projet sur la blockchain, ce qui est hyper innovant.
Stiépan A. Kovac, CEO de QR Crypto à Fribourg: A la base de la protection des données, de blockchain, il y a la cryptographie qui est à la base de la sécurité informatique. C’est la pierre angulaire. Je parlerais de QRC pour sécuriser la 5G. Nous sommes à l’aube d’une révolution, il y aura des ordinateurs quantiques qui seront encore bien plus rapides sur la vitesse de calcul. Cette nouvelle vitesse inquiétera à son tour la sécurité du jour au lendemain. Et pourtant, nous aurons besoin de protection supplémentaire pour les données, en particulier pour tout ce qui va concerner les systèmes de santé, sans oublier les questions militaires. Car d’ici 2030, la cryptographie actuelle sera cassée. De nombreux logiciels actuels devront être adaptés. Il faut adapter la cryptographie au monde post-quantique…le plus important, c’est le standard X.1811 qui permettra de sécuriser la 5G. Et peut-être pour la 6G, selon une spécialiste chinoise. Un enjeu, c’est notamment d’avoir des cartes SIM résistantes.